IRAN – Ispahan

ISPAHAN

10 juin 2019

Après cette grosse journée, nous arrivons chez Mahi à la Anar Guest House. C’est sa maman qui nous accueille le temps que Mahi rentre du travail et même si son anglais se compose de quelques mots, nous arrivons tant bien que mal à communiquer. Comme toujours, on nous offre le chaï (thé) et quelques douceurs (dattes, pastèque…).

Nous prenons ensuite possession de nos lits puis décidons d’aller visiter le quartier proche de Jolfa, le quartier arménien plutôt branché.

Le contraste avec une Kashan plutôt traditionnelle et assez religieuse est saisissant. Ici, pas de femme en tchador noir ou d’échoppe vendant tout et n’importe quoi. Hyper-moderne, ce quartier d’Ispahan dévoile des avenues où les magasins et centre commerciaux aux vitrines attirantes alternent avec des cafés et restaurants où la musique « occidentale » résonne. A cette heure, le quartier est hyper-animé et la population y est très jeune. Le décalage avec Kashan y prend toute sa dimension dans le code vestimentaire. Nous avons l’impression d’être des ploucs au milieu de jeunes branchés, où les femmes essaient d’en dévoiler le plus possible tout en restant dans le cadre de la loi. Les foulards tous très colorés sont mis de façon à laisser passer le plus de cheveux possible et le maquillage est loin d’être discret au risque d’être parfois vulgaire. Les coiffures des hommes ne sont pas non plus en reste, avec souvent des cheveux longs ou teints.

Un marchand de tapis nous alpague au détour d’une rue et « pour le plaisir des yeux », nous décidons de le suivre dans sa boutique. Il s’agit alors d’une démonstration privée et le vendeur parle un français impeccable. Il nous offre ensuite le thé, tradition avant de parler de choses sérieuses en Iran, et pendant une demi-heure, il nous montre ses tapis et nous explique les différences entre les motifs, les couleurs, la qualité et les tailles de ses produits. La « visite » est très intéressante puisqu’il s’agirait d’une très grosse compagnie et un des meilleurs fabricants du coin, et en plus on peut y payer par carte bancaire et se faire livrer. Royal !

Le vendeur était excellent, mais nous réussissons l’exploit de ressortir de la boutique sans un tapis sous le bras et continuons de déambuler dans le quartier. Nous faisons ainsi le tour de la cathédrale de Vank, bel édifice chrétien, puis il est temps de rentrer, sans oublier de passer par la case glace à l’italienne, très prisée des locaux.

Nous rencontrons enfin Mahi, jeune iranienne qui cumule les activités pour subvenir aux besoins de sa famille. Nous discutons longuement avec notre hôte, notamment de la vie en Iran. Elle nous parle ainsi de la difficulté des locaux pour vivre depuis l’embargo américain, difficultés qui se sont accrues avec l’arrivée au pouvoir de Donald Trump et les nouvelles sanctions infligées à l’Iran. La monnaie ne vaut plus rien et les prix se sont envolés, et si ces sanctions visent le gouvernement iranien, ce sont bien les habitants qui en font les frais. Et à moins de travailler pour le gouvernement ou une grande société qui offrent beaucoup d’avantages, la vie est très difficile pour les iraniens. Elle nous glissera d’ailleurs que depuis trois ans, à cause de la dévaluation de la monnaie, son salaire est passé de 300 euros à 80 euros par mois. Elle gagne beaucoup plus d’argent avec la guest house et garde son travail uniquement pour garder de l’expérience.

Enfin, il est temps d’aller se coucher, une autre belle journée nous attend avec la visite plutôt culturelle d’Ispahan.

11 juin 2019

Après la surprise du quartier Jolfa, nous allons nous attaquer au nord d’Ispahan. D’après Mahi, la partie au nord de la rivière est bien plus traditionnelle et religieuse que le sud plus moderne et branché.

Pendant le petit déjeuner, copieux et composé de tomates, concombres, pain, fromage, confitures et pastèques, nous discutons avec un japonais qui fait ses études à Bordeaux. Il veut travailler dans le vin et connaît plutôt bien Dijon puisqu’il a déjà travaillé dans un domaine de Savigny les Beaune. Improbable.

Nous discutons aussi avec Carolin, une allemande qui a tout plaqué pour voyager et cela fait 6 mois qu’elle bourlingue sans billet de retour.

Elle nous propose de l’accompagner lors d’un Free Walking Tour organisé par le Mahabibi Hotel. Nous acceptons volontiers puisque nous n’avons jamais participé à ce genre de visite guidée d’une ville, gratuite et basée sur le pourboire.

Nous partageons donc un taxi pour nous rendre à l’hôtel, et nous serons donc une petite dizaine à visiter le quartier touristique d’Ispahan en compagnie d’une jeune guide et de son collègue qui apprend le métier pour changer de carrière.

La visite commence par la place Naqsh-e Jahan (ou place de l’Imam), la deuxième plus grande place du monde après Tiananmen en Chine. Totalement piétonne, seule des calèches peuvent y circuler. Cette place est superbe et les monuments qui l’entourent en font un point d’intérêt à ne pas manquer.

Nous continuons la visite par la mosquée de l’Imam, anciennement mosquée du Shah. En effet, depuis la révolution islamique de 1979, toutes les places, rues ou monuments qui portaient le nom du Shah ont été renommées par Imam ou Imam Khomenei.

Cette mosquée est magnifique et les explications de la guide sont claires et très intéressantes. Nous y apprendrons par exemple que le Shah utilisait les murs d’entrée de la mosquée pour y graver ses décrets, comme celui sur la propreté de la ville et l’éducation à l’utilisation des poubelles et au nettoyage des rues. Cela se ressent en Iran puisque les villes y sont propres et certaines des nôtres pourraient s’en inspirer.

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Nous ressortons pour aller visiter le palais Ali Qapu. Situé lui aussi sur la place Naqsh-e Jahan, il servait de résidence et de réception au Shah.  Encore une fois les explications nous permettent de profiter au mieux de cet endroit, avec notamment cette vue imprenable sur la place. Cette « tribune » permettait au Shah d’assister à des parties de polo qui avaient lieu à l’emplacement actuel de la place. L’emplacement des poteaux y est d’ailleurs encore visible.

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On nous montrera également un salon de musique assez intéressant, où les murs ont été creusés pour que l’acoustique soit parfaite.

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C’est l’heure ensuite de faire une pause visite pour aller déguster une spécialité iranienne, la glace au safran. Très bon mais un peu écœurant sur la fin, c’est tout de même un parfum à retenir pour plus tard mais en plus petite quantité.

Nous passons ensuite par le Bazar pour continuer notre visite et voir quelques artisans locaux comme des décorateurs d’assiettes, des peintres sur feuilles d’arbre, des artisans qui travaillent le cuivre ou encore une compagnie qui crée des nappes décorées au tampon encreur.

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La prochaine étape de ce tour est le palais Kakh-e Chehel Sotun ou palais des 40 colonnes. Le cadre est superbe et la bâtisse, bien qu’en rénovation (comme beaucoup de monuments en Iran) vaut le coup d’oeil. Il s’agit un peu de la chambre d’amis du Shah, une résidence accueillant les hauts dignitaires étrangers.

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Le groupe commence à fatiguer et la fin de la balade serait la bienvenue. On nous emmène quand même dans le petit magasin d’un producteur de safran qui nous explique comment on passe d’une fleur à une épice très convoitée. L’Iran en est d’ailleurs un des plus gros producteurs du monde.

L’excursion se termine enfin par le restaurant recommandé par les guides de l’hôtel, mais pas très bon marché nous décidons avec Carolin de passer notre tour. Nous remercions notre guide pour la balade et même si elle n’a pas trop apprécié notre départ anticipé, elle nous aura fait passer dans l’ensemble une bonne journée. Ce tour était un peu long sur la fin mais c’était vraiment intéressant de pouvoir entrer un peu dans la culture islamique iranienne de cette manière.

C’est donc avec Carolin et un couple hispano-irlandais qui a aussi zappé le restaurant que nous allons déjeuner dans un restaurant recommandé par le célèbre hibou. Salade et jus, accompagnés d’une petite assiette de frites, ce n’est pas ici que nous mangerons local.

Quoique, nous nous sommes rendu compte au fur et à mesure que les iraniens sont plutôt friands de fast-food et consomment beaucoup de burgers, pizzas, falafels ou kababs.

Repus, fatigués et écrasés par la chaleur, nous décidons de rentrer à la Guest House. Après une leçon de négociation de Carolin, c’est en taxi que nous arrivons pour l’heure de la sieste.

Une fois reposés, nous décidons de sortir manger une petite glace à l’italienne histoire de prendre l’air.

Nous ne rentrons pas trop tard et en profitons pour discuter avec Mahi de la société iranienne. Elle nous dévoile qu’un grand nombre d’entre eux, surtout les jeunes, ne sont pas pratiquants voire même non croyants. Ils sont opprimés par la puissante police qui préfère traquer les comportements « immoraux » plutôt que les conducteurs qui grillent les feux rouges devant eux par exemple. Pourtant, underground il y a beaucoup de jeunes qui transgressent les codes dictés par les ayatollahs et elle nous parle même d’un endroit illégal à Ispahan. Tous les jeudis soir un genre de boîte de nuit ouvre ses portes et ce sont des familles entières toutes générations confondues qui viennent danser et s’amuser en oubliant un peu les codes vestimentaires obligatoires comme le Hijab. Dommage que nous repartions avant car Mahi nous proposait d’y aller avec elle et ses amis.

Nous sentons bien que la nouvelle génération, plus connectée vers l’extérieur, cherche petit à petit à se libérer mais la puissance des ayatollahs et de la police l’en empêche. Jusqu’à quand ?

Après cette discussion très intéressante, Emie la végétarienne et Carolin la vegan expliquent à Mahi ce qui peut se passer dans les abattoirs et toutes sortes d’autres choses horribles concernant l’élevage et la consommation de viande. Nul doute qu’après avoir vu quelques documentaires, Mahi deviendra elle-même végétarienne et pourra dire au revoir aux kababs.

Il est enfin temps de se coucher après cette nouvelle grosse journée et il ne nous faut pas longtemps pour tomber de sommeil.

12 juin 2019

Dernière journée à Ipahan, et après un petit déjeuner royal nous décidons de partir par nos propres moyens visiter d’autres points d’intérêt. Le programme sera d’aller en taxi jusqu’à la mosquée Jameh puis de redescendre à pied jusqu’à la guest house en passant par les visites à faire.

C’est donc par la plus grande mosquée d’Iran que nous débuterons notre journée. Aux alentours, des échoppes vendent comme toujours tout et n’importe quoi, et en parlant de n’importe quoi un marchand attire notre attention. Sur un bout de trottoir, celui-ci vend des petits animaux en cages. Il va sans dire que les cages sont minuscules mais chose improbable, il vend des poussins… colorés. Verts, bleus, roses, les poussins sont peints et sont vendus aux enfants. Un hérisson est même proposé aux acheteurs potentiels !

Après réflexion, nous n’achetons pas de poussins et continuons notre route pour entrer dans la mosquée Jameh. Et effectivement, nous sentons tout de suite que le lieu est immense et majestueux. Le dôme et les minarets sont incroyables et les salles de prière immenses.

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Le centre de la mosquée est normalement utilisé pour les ablutions, mais aujourd’hui quelque chose se prépare. Des enceintes et des tapis sont installés et une fiesta en grande pompe semble s’organiser. Nous pouvons d’ores et déjà éliminer Beyoncé, Rhianna ou David Guetta de la liste, mais quelqu’un d’important prépare sa venue. Un guide nous annonce qu’il s’agit d’un politicien ou un religieux important qui vient faire un meeting, mais il n’en sait pas plus et cela n’a pas l’air de l’intéresser plus que ça.

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La visite terminée, c’est par le bazar, couvert et ombragé que nous allons rejoindre la place Naqsh-e Jahan. Nous déambulons encore dans cette ambiance de marché aux épices et autres objets artisanaux qui cohabitent avec les bijoux, les habits ou les jouets made in China.

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Nous retrouvons alors cette place majestueuse et allons en direction de la dernière mosquée que nous voulions visiter, la mosquée Cheikh Lotfollah. Celle-ci est fermée et ne rouvre qu’une heure plus tard, nous passons donc notre tour. De toutes façons nous sommes repus de mosquées !

C’est la direction des jardins du palais Hasht Behesht que nous prenons ensuite, et sur le chemin nous décidons de rentrer dans un fast-food pour manger des falafels. Encore une fois, manger local ici c’est aussi les fast-foods ! Même si le pain est un peu bourratif, le sandwich est bon et comble nos estomacs.

Une glace à l’italienne à la main, nous visitons les jardins de ce palais, très arboré et agréable par cette chaleur.

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Ce parc est tout près du pont Si-o-Seh Pol, un des ponts uniquement piétons d’Ispahan, que nous empruntons pour passer la rivière et retourner à la Guest House. Nous y voyons une pauvre jeune iranienne se faire emmener par une ambulance après une chute dans les escaliers. La pauvre est en pleurs.

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Nous passons ensuite l’après midi à ne rien faire à part la sieste.

Vers 18h, nous décidons de prendre une voiture jusqu’à la cathédrale de Vank et essayer de régler notre problème de carte SIM qui n’aura fonctionné qu’une journée. Malheureusement, nous sommes obligés d’en racheter une et désormais nous pouvons communiquer avec les guest houses, les guides et préparer notre itinéraire ailleurs que dans nos chambres.

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La nuit tombe et nous en profitons pour aller voir une curiosité à Ispahan. En effet, la nuit tombée, les locaux affluent vers le pont Pol-e Khaju pour s’y installer, boire le thé, fumer la chicha et organiser des petits concours de chants.

Le cadre est magnifique et sous les arches de ce pont, nous assistons à quelques chants traditionnels. L’ambiance y est vraiment spéciale, et fait de ce lieu un passage obligé d’Ispahan.

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Nous retournons alors à la guest house, et comme chaque soir, c’est autour d’un thé que nous continuons à discuter avec Mahi de son pays. Elle nous montre des vidéos de deux de ses amis qui viennent de se marier, et pour nous c’est extrêmement surprenant. En effet, la célébration du mariage est sensiblement la même que chez nous. Robe blanche pour la mariée, plus colorée pour ses témoins, costume noir pour le marié et ses témoins, ici pas de Hijab ou d’interdictions. Evidemment l’alcool ne coule pas à flot, mais dans un pays islamique où les codes sont si stricts, c’est vraiment surprenant de voir ce clip monté par des étudiants en art illustré par une musique de Bruno Mars.

Nous en profitons pour lui faire part de cet étonnement, puisque pour Emie, nous n’avons prévu que des tenues sombres et sobres. Elle nous montre alors une page Instagram, spécialisée dans la mode féminine en Iran. Tout est coloré, les tenues, les cheveux, les visages.

 

Mahi nous explique ensuite comment sont formés les couples. Comme nous, si les deux conjoints se connaissent depuis longtemps et sont déjà ensemble avant le mariage, pas de soucis. Par contre, si un homme veut se marier alors qu’il n‘a pas de compagne, sa mère sonde le quartier et ses amies pour savoir s’il n’y aurait pas une fille à marier. Une fois trouvée, les deux futurs conjoints se rencontrent avec leur famille respectives pour discuter dans un endroit neutre, comme un hôtel par exemple. S’ils ne se plaisent pas, chacun rentre chez soi et cherche ailleurs. S’ils se plaisent, les familles leur offre un week end pour se connaître et si tout va bien, ils se fiancent puis se marient.

Il faut enfin clore cette nouvelle belle journée, la dernière à Ispahan, et même si la première impression n’a pas été très bonne, finalement nous avons passé un bon séjour ici, en grande partie grâce aux discussions que nous avons eues avec Mahi.

Notre Guest-House : la ANAR Guest House : 15 euros la nuit (chambre double, salle de bain partagée, petit-déjeuner). Simple, mais réellement chez l’habitant, nous y avons passé un excellent séjour. Petit-déjeuner royal et discussions très intéressantes avec Mahi, une jeune iranienne qui nous a beaucoup aidé. Pas besoin d’hésiter !

Entrée mosquée Imam : 200 000 IRR /p

Entrée Ali Qapu Palace : 200 000 IRR /p

Entrée Chehel Sotun Palace : 200 000 IRR /p

Free Walking Tour : nous avons donné 500 000 IRR pour deux.

Mosquée Jameh : 200 000 IRR /p

Bus Ispahan – Yazd : 300 000 IRR /p (4 heures)


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